Enfants - Education


Horaires & Programme de l'école primaire (maternelle + élémentaire) (BO)
Qu'apprend t'on au collège (texte officiel)








La séparation


J'ai cru me faire de la lumière
et je t'ai fait de l'ombre,
plus longue maintenant,
je sais,
le soir descend.
Les failles du passé
sont familières :
elles ne s'écartent plus,
ne se rapprochent pas.
Est-ce que nous attendons
le même rayon vert ?


Socle commun pour le XXI siècle : Lire, écrire, compter et raisonner

  • Evaluation de l'enseignement en France et dans le monde (PISA 2003) : 
Pays
Ecrit  -  Mathématiques  -  Sciences Total
Finlande
1 - 2 - 1
4
Corée
2  -  3  -  4
9
Hong Kong - Chine
10  -  1  -  3
14
Pays-Bas
9  -  4  -  8
21
Japon
14  -  6  -  2
22
Canada
3  -  7  -  11
21
Australie
4  -  11  -  6
21
France
17  -  16  -  13
46
Allemagne
21  - 19  - 18
58
Moyenne OCDE
19  -  21  -  19
59

  • Apprentissage de la lecture (lire, écrire)
    • Méthodes : globale, semi-globale, syllabique : aujourd'hui les meilleurs systèmes éducatifs utilise la méthode syllabique pure, beaucoup y reviennent !
      • Syllabique pure : Royaume-Uni, Finlande, Suisse
      • Syllabique mixte : Etats-Unis, Australie, Allemagne, Italie, La France revient dans les textes à cette méthode après 30 ans de méthode globale mais dans les faits ?
    • Apprentissage-lecture.com
  • Enseignement des mathématiques (compter)
  • Enseignement des Sciences (raisonner)
    • Ecole primaire
      • La main à la pâte
        • Les 10 principes de la démarche pédagogique
             1. Les enfants observent un objet ou un phénomène du monde réel, proche et sensible et expérimentent sur lui.
             2. Au cours de leurs investigations, les enfants argumentent et raisonnent, mettent en commun et discutent leurs idées et leurs résultats, construisent leurs connaissances, une activité purement manuelle ne suffisant pas.
             3. Les activités proposées aux élèves par le maître sont organisées en séquence en vue d’une progression des apprentissages. Elles relèvent des programmes et laissent une large part à l’autonomie des élèves.
             4. Un volume minimum de deux heures par semaine est consacré à un même thème pendant plusieurs semaines. Une continuité des activités et des méthodes pédagogiques est assurée sur l’ensemble de la scolarité.
             5. Les enfants tiennent chacun un cahier d’expériences avec leurs mots à eux.
             6. L’objectif majeur est une appropriation progressive, par les élèves, de concepts scientifiques et de techniques opératoires, accompagnée d’une consolidation de l’expression écrite et orale.
        • Le partenariat
             7. Les familles et/ou le quartier sont sollicités pour le travail réalisé en classe.
             8. Localement, des partenaires scientifiques (universités, grandes écoles) accompagnent le travail de la classe en mettant leurs compétences à disposition.
             9. Localement, les IUFM mettent leur expérience pédagogique et didactique au service de l’enseignant.
            10. L’enseignant peut obtenir, auprès du site Internet, des modules à mettre en œuvre, des idées d’activités, des réponses à ses questions. Il peut aussi participer à un travail coopératif en dialoguant avec des collègues, des formateurs et des scientifiques.
    • Collège
      • L'expérience de la main à la pâte est en cours d'extension au collège
    • Lycée
    • Université & école d'ingénieurs
  • Enfants précoces
    • 1er décembre 2005 : ouverture du Centre de Ressources Français pour Enfants Surdoués en Difficulté à Rennes. Plus de détails : ANPEIP
    • Rapport Delaubier
    • La dictature du QI
      • "Petit à petit, le QI s’est imposé dans les écoles, puis dans les cabinets de recrutement où l’on était trop heureux de disposer d’une mesure « scientifique » de l’intelligence. Dans les années 1960, son hégémonie voire sa dictature a été remise en cause. Comment croire qu'un chiffre unique puisse mesurer à lui seul une qualité aussi complexe que l'intelligence humaine ? Sans doute le test permet-il de prévoir la réussite scolaire des enfants dans un système qui privilégie les mathématiques et l’abstraction, mais il n’évalue pas les capacités d’individus sur leur lieu de travail. Il ne prend pas en compte leur aptitude à négocier, réagir, comprendre les autres ou à se maîtriser eux-mêmes."
    • Les intelligences multiples
      • Les intelligences multiples de Howard Gardner    

        A l'école et en formation supérieure ce sont encore des mesures de Q.I. (quotient intellectuel), axées sur les capacités verbales et non verbales logico-mathématiques, qui évaluent la réussite d'un élève. Trop souvent, hélas, la recherche de solutions créatives en entreprise continue à favoriser ces deux formes d'intelligence à l'exclusion de toute autre forme d'intelligence.  En réalité, une personne qui réussit met en œuvre davantage de formes d'intelligence que l'intelligence linguistique et l'intelligence logico-mathématique qui sont à la base de l'expertise technique. En créativité, se servir de vos huit intelligences et de vos cinq sens. Comment caractérise-t-on ces intelligences ? Par exemple, l'intelligence dont surgit l'intuition géniale, l'intelligence qui sait donner un sens à une sensation , l'intelligence qui sait améliorer le travail de tous les jours à partir d'une valeur personnelle ou d'une vision, l'intelligence qui sait à quel moment il faut prononcer un petit mot d'encouragement ? Comment nomme-t-on l'intelligence qui a fait surgir une sculpture d'un bloc de pierre informe, qui a su créer une idée novatrice à partir d'une feuille d'arbre restée accrochée à une veste, qui sait nourrir une conversation entre amis, qui sait créer une ambiance de travail agréable par ses faits et par ses gestes, qui sait montrer aux gens que l'on s'entend bien, qui imprime un rythme au travail favorable à l'épanouissement de tous, qui instaure par un ton de voix une compréhension partagée, qui fait vivre des images qui éclairent un sujet difficile ? Les six autres formes de l'intelligence : Howard Gardner, psychologue cognitiviste et "développementaliste" américain, caractérise six formes d'intelligences qui ont souvent été laissées de côté par le milieu scolaire et qui ne sont pas assez valorisées au travail. C'est à ces formes d'intelligence des participants que nous allons faire appel lors de notre atelier "Performance".

            * L'intelligence visuo-spatiale, c'est-à-dire penser en images, externes ou mentales L'intelligence corporelle-kinesthésique, c'est-à-dire penser par sensations corporelles, "in-corp-or-er" la pensée
            * L'intelligence naturaliste, qui reflète la connaissance de la faune et de la flore L'intelligence musicale, c'est à dire penser avec rythmes et mélodies, faire attention à l'harmonie d'un ensemble
            * L'intelligence interpersonnelle, c'est-à-dire penser avec l'autre, comprendre et se faire aider par son semblable
            * L'intelligence intrapersonnelle, c'est se penser, se connaître, se construire une identité personnelle.

        A travers un certain nombre d'exercices pendant nos ateliers de créativité, nous pouvons associer les intelligences multiples de chaque participant avec les cinq sens :  visuel, auditif, corporel, gustatif, olfactif. Et, pour autant, nous ne négligeons jamais les deux autres intelligences : L'intelligence verbale, et l'intelligence logico-mathématique. Mais au moment où nous faisons appel à ces deux intelligences plus classiques, elles sont déjà énormément enrichies par l'ambiance qui a été créée grâce à l'utilisation des six autres types d'intelligence et de nos cinq sens. Pour plus d'informations, nous vous proposons :
        "A l'école des intelligences multiples" La théorie d'Howard Gardner en pratique, Hachette, A paraître en juillet 2006
      • Les Intelligences multiples, Howard Gardner, éditions RETZ, collection Forum Éducation Culture, 2004. Recension suivie d’une interview de l’auteur par Sylvie Abdlegaber.

        dimanche 6 novembre 2005

        Sylvie Abdelgaber nous propose cette présentation de l’ouvrage de Howard Gardner à l’occasion du Forum Éditions Retz-Monde de l’Éducation (mars 2005) dont il était l’invité d’honneur. Elle a rencontré Howard Gardner dont on trouvera l’interview en fin d’article.

        Les éditions Retz publient cette mise à jour de Multiple Intelligences : The Theory in Practice, un titre paru en 1993 chez Basic Books, New-York, dix ans après la publication de sa théorie pour la première fois aux États-Unis dans l’ouvrage Frames of Mind : A Theory of Multiple Intelligences, Basic Books, 1983. Howard Gardner y propose sa conception modulaire de l’intelligence et la définition de sept intelligences. Plus tard est venue s’y ajouter une huitième puis se discuter une neuvième candidate au titre, dit le cognitiviste qui, se référant non sans humour à Fellini, en reste pour l’instant aux huit suivantes : logico-mathématique ; linguistique ; spatiale ; corporelle/kinesthésique ; musicale ; interpersonnelle ; intrapersonnelle ; naturaliste ; et la huitième et demi : existentielle. Les deux premières sont traditionnellement celles que l’école valorise le plus, l’intelligence logico-mathématique de plus en plus, au cours des cinq cents dernières années, au détriment du langage. Les trois suivantes touchent à des domaines plus artistiques. L’intelligence spatiale a été indispensable aux grandes découvertes, l’intelligence corporelle est particulièrement mobilisée dans le sport, et l’intelligence musicale rythme et harmonise. L’intelligence interpersonnelle et l’intelligence intrapersonnelle ont été les plus discutées, la première étant celle que nous employons dans notre compréhension d’autrui et notre capacité à travailler ensemble, la seconde dans notre compréhension de notre propre fonctionnement. L’intelligence naturaliste classe et définit, traditionnellement les plantes et les animaux mais de nos jours également, sous une forme « recyclée », les marques dans les supermarchés. L’intelligence existentielle, dernière née de la théorie, n’est pas encore complètement acceptée ; les dénominations d’« intelligence religieuse ou spirituelle » ont été rejetées, il se peut qu’elle soit retenue comme l’intelligence des grandes questions. Pour définir une intelligence, Howard Gardner utilise huit critères distincts, issus d’une synthèse de disciplines scientifiques. Sans entrer dans les détails de la psychologie cognitive, nous pouvons tenter de les résumer ainsi. Une intelligence doit pouvoir être localisée physiquement, et peut se trouver isolée, par exemple lors de dommages cérébraux. Elle doit avoir un sens dans l’histoire de l’évolution de l’humanité. L’opération ou les groupes d’opérations qu’elle commande sont repérables indépendamment des autres. Elle utilise un système symbolique distinct, objet d’apprentissage. Elle se développe en plusieurs stades au cours de la vie, jusqu’au stade d’expert, chaque intelligence devenant de plus en plus internalisée. Elle apparaît de manière extrême chez de rares individus, idiots-savants, par exemple, ou prodiges. Elle peut généralement se mobiliser en même temps qu’une autre de nos intelligences. Elle est sans doute mesurable, bien que ce soit en réaction contre les mesures de QI que Howard Gardner a d’abord développé sa théorie. À l’aide de ces critères, Howard Gardner définit une intelligence comme « un potentiel bio-psycho-social qui permet de traiter des informations et qui, activé dans une ou plusieurs sociétés, permet de résoudre des problèmes ou de créer des produits qui ont une valeur dans cette culture ». Tous les hommes en sont pourvus, chacun à sa manière. Il n’y a pas de lien direct entre la théorie scientifique et les recommandations pédagogiques qui peuvent en découler, précise Gardner. Au nom des intelligences multiples, on peut tout faire, et n’importe quoi. Il ne travaille pas sur les choix éducatifs ou éthiques. Il propose cependant un éventail d’applications possibles qu’il développe dans son livre l’Intelligence et l’École, traduit en 1996 aux éditions RETZ. Six fenêtres lui paraissent ouvertes aux enseignants pour mieux prendre en compte nos diversités d’ordre cognitif. Sans vouloir mettre en jeu toutes les intelligences, il est bon de penser à plus d’une, et varier nos approches des sujets que nous traitons : Utiliser des nombres, il y en a partout, et les classifications. Raconter des histoires, développer les entrées narratives. Entrer dans un sujet sur un mode esthétique ou artistique. Y entrer par les « grandes questions ». Faire et faire faire. Entrer par le collectif.

        Sylvie Abdelgaber a rencontré Howard Gardner qui, le 9 Mars 2005, était l’invité d’honneur du Forum organisé par les éditions Retz et le Monde de l’Education sur le thème « l’école et l’intelligence, ce qu’en pensent les psychologues aujourd’hui ».

        On hésite parfois à employer le terme « intelligence », surtout au singulier...

        C’est ce qu’en anglais nous appelons le « politiquement correct » qui peut empêcher d’utiliser le mot « intelligence », surtout lorsqu’on parle officiellement. Pourtant, il n’y a aucun moyen d’empêcher les gens d’utiliser ce terme tous les jours : mon travail consiste à voir ce que l’on entend par là. A mon avis, le sens de ce mot change avec ce que l’on cherche. Si l’on cherche, par exemple quelqu’un qui travaille dans le marketing chez un éditeur, on ne recherche pas les mêmes qualités que pour un professeur de Grec. On utilise pourtant le même mot : l’éditeur appellera intelligent quelqu’un qui comprend rapidement l’essentiel d’un livre, qui saura à qui le proposer, avec quels contacts perdre ou ne pas perdre de temps. On embauchera un professeur de Grec qui aura l’intelligence du Grec et la capacité de l’enseigner à des enfants qui peuvent être réticents.

        En fractionnant la notion en plusieurs facettes, je crois que j’aide les gens à mieux définir ce qui est important selon les cas. Si vous prenez dix métiers différents dans nos sociétés, chacun réclame probablement des combinaisons différentes d’intelligences. Je ne crois pas que Einstein aurait pu être Mozart, ou que Mozart aurait pu être Pierre Curie. Leurs capacités étaient d’ordres différents.

        Nos capacités d’intelligence seraient-elles donc définies une fois pour toutes ?

        Je ne pense pas que regarder les intelligences comme une palette variée les fige. Je crois que toute intelligence peut être développée, si on y travaille. A l’inverse, si on arrête de regarder par exemple les chiffres, on n’a aucune chance de devenir meilleur dans ce domaine là ! La différence, c’est que dans certains domaines, un tout petit effort vous emmènera assez loin, tandis que dans d’autres domaines, il vous faut travailler très dur pour un tout petit progrès.

        C’est que vos intelligences ne sont pas entièrement sous votre contrôle. Elles dépendent de vos parents, de votre biologie, ainsi que de votre expérience. Quelqu’un dont les parents sont musiciens et qui en plus dès l’enfance a écouté et joué beaucoup de musique a de plus grandes chance d’avoir développé une meilleure intelligence musicale que quelqu’un qui n’a ni les parents musiciens, ni l’expérience de la pratique musicale. Dans un de mes livres je parle de la méthode Suzuki pour l’ enseignement du violon. On a dit qu’il allait chercher les génies, mais ce n’est pas vrai, c’est lui qui a fait preuve de génie en allant chercher des enfants « ordinaires » et en mettant en place une méthode qui commence au berceau, avec de tout petits violons et une grande implication de la mère.

        N’est-ce pas du talent, plutôt que de l’intelligence ?

        Si j’avais parlé de différents talents, ma théorie n’aurait pas un impact aussi fort, car nous savons tous que nous avons différents talents. J’ai utilisé le mot intelligence délibérément, comme une façon stimulante de poser la question suivante : pourquoi appeler intelligent quelqu’un qui est doué pour les chiffres, et utiliser un autre terme pour quelqu’un qui serait meilleur dans le traitement d’informations spatiales ou plus efficace dans les relations avec les autres ?
        Il y a toujours un danger de coller des étiquettes, mais on ne peut pas empêcher les classifications. Dès trois ans, les enfants classent, que vous leur appreniez ou non. Le problème c’est de savoir si le système de classification est bon ou s’il n’est pas trop pris au sérieux.

        Est-il important pour les enseignants de connaître les différentes intelligences ?

        Je tiens à dire ma prudence à l’égard des évaluations. C’est contre l’idée d’un Q.I. qui mesurerait une intelligence unique et innée que s’est construite ma théorie. Il ne s’agit pas de multiplier les errements des tests de l’intelligence unique par mes huit formes (et demie) d’intelligence ! Une véritable industrie du test des intelligences pourrait naître, et pour moi, là, il y a un danger.

        Si votre enfant suit bien à l’école il n’y a aucune raison d’évaluer ses intelligences. Par contre, s’il a des problèmes, alors cela peut valoir la peine. Mais les problèmes scolaires peuvent avoir des causes sociales ou émotionnelles, provenir de problèmes de motivation ou de problèmes cognitifs. Pour ma part, je ne travaille que sur l’aspect cognitif. Si un enfant a des problèmes spatiaux ou corporels ou interpersonnels, c’est intéressant de le savoir. En effet, on pourra alors aborder les apprentissages par un autre chemin. Il y a plusieurs façons d’apprendre la géométrie, ou l’histoire. Les enseignants n’ont pas besoin de ma théorie pour savoir que tous les enfants n’apprennent pas de la même manière. D’ailleurs, il y a plusieurs façons d’enseigner les choses que l’on sait. Si l’on comprend bien quelque chose, on peut l’expliquer de plusieurs manières. Cependant se donner plusieurs manières de procéder ne vient pas toujours pas naturellement : c’est en regardant d’autres faire, en faisant des essais, en échangeant, qu’on peut apprendre à voir là où l’on est le plus à l’aise, où les autres savent mieux faire, on peut évoluer... comme enseignant aussi.

        Votre théorie scientifique s’applique-t-elle directement à l’école ?

        La théorie des intelligences multiples n’est pas une méthode éducative, mais elle intéresse les éducateurs car quiconque a travaillé avec des enfants sait qu’ils ne sont pas tous faits sur le même modèle. Si on observe les enfants avec attention, et c’est ce qui se fait dans des écoles qui ont des projets « intelligences multiples », on voit toutes sortes de différences. Je propose un système de lecture de ces différences cognitives. Je ne parle pas des différences de personnalité ou de tempérament.
        L’école doit enseigner à vivre ensemble. Elle doit aussi transmettre ce que tout le monde doit savoir du monde, du pays. Mais en fin de compte, chaque enfant va faire son propre sens de ce qui lui est enseigné.
        Quelquefois on me demande si je suis partisan de filières qui mettraient les enfants ensemble selon leurs capacités. Je pense qu’il est important que l’école enseigne à vivre avec des gens différents, avec des approches, des intelligences différentes. Alors, non, je ne suis pas pour des filières, en tous les cas pas pour tout. Peut-être qu’en mathématiques, ou en langues, je serais pour travailler à des niveaux différents, mais en histoire, cela n’aurait pas de sens. En mathématiques, une hétérogénéité trop grande comme nous en connaissons aux Etats-Unis n’est que source de frustration pour les forts, comme pour ceux qui n’y arrivent pas. Les mettre ensemble ne sert personne—en tous les cas, pas avec les mêmes tâches à accomplir. Cela ne sert qu’une idéologie. Par contre, pour réfléchir à l’actualité, l’hétérogénéité est importante, il faut comprendre comment les autres voient les choses.

        Comment votre théorie se situe-t-elle par rapport à d’autres travaux sur les différences cognitives ?

        Certains de mes livres peuvent être lus comme un long débat avec Jean Piaget, à qui je dois beaucoup. La théorie des intelligences multiples diffère d’autres approches cognitives — il faut dire que la plupart des gens qui étudient les différences cognitives partent souvent des organes des sens. Ma théorie va au-delà. Le langage peut venir par les yeux, l’oreille ou les doigts, peu importe, notre « module d’ordinateur » traite l’information linguistique après la perception. Je ne crois pas que l’on peut parler d’un apprentissage « visuel » ou « auditif », cela ne me paraît pas consistant. Lire, par exemple, est une activité visuelle, mais on confond souvent le sens que nous utilisons avec le système symbolique auquel nous nous référons, qui est graphique. Si on maîtrise le langage, on apprend à lire quand on apprend à utiliser le système symbolique écrit, cela n’a que peu à voir avec les yeux. Le terme « auditif » aussi, mélange le linguistique et le musical, qui n’ont que peu en commun. S’il existait vraiment un apprentissage ‘auditif’, il s’appliquerait forcément aux deux, et ce n’est pas le cas.

        D’autre part, les critères que j’applique pour définir ce qui compte comme intelligence ne permettent pas qu’un beau matin, on décide qu’il existe une intelligence sexuelle, une pour la cuisine ou l’humour. Et on pourrait penser que l’intelligence logico-mathématique, qui met en jeu des parties différentes du cerveau, doit être considérée comme une pluralité d’intelligences plutôt que comme une entité monolithique. Il est difficile de faire des mathématiques sans avoir la logique, mais l’inverse n’est pas vrai. La dimension spatiale des mathématiques n’est pas nécessaire à la logique. Et, critère important, le cerveau ne traite pas tout cela dans la même zone. Dans mes propositions initiales, publiées en France chez Odile Jacob, je montre comment chaque intelligence se subdivise en plusieurs composantes.

        Vous simplifiez pour pouvoir mieux lire la complexité ?

        Exactement. Tout étudiant en psychologie sait que le langage se situe plutôt dans des zones médianes de l’hémisphère gauche, la perception spatiale est postérieure droite, pour les droitiers, en tous cas. Par rapport aux théories qui différencient hémisphère droit, hémisphère gauche, la théorie des intelligences multiples fait un pas en avant. Elle permet de différencier un peu plus, sans pour autant scinder les intelligences en cent cinquante, ce qui nous empêcherait totalement d’y voir clair. Ma théorie permet d’avancer, mais elle est suffisamment simple pour être comprise par tous. Les pédagogues en particulier.

        Propos recueillis et adaptés de l’anglais par Sylvie Abdelgaber.
      • l'intelligence verbale/linguistique
        C'est la capacité à être sensible aux structures linguistiques sous toutes ses formes. Elle est particulièrement développée chez les écrivains, les poètes, les orateurs, les hommes politiques, les publicitaires, les journalistes, etc. On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui aime lire, qui parle facilement, aime raconter des histoires et aime en entendre, qui aime les jeux avec des mots (mots croisés, Scrabble, etc.), les jeux de mots, les calembours. La plupart des systèmes d'enseignements reconnaissent cette intelligence. Si elle n'est pas suffisamment développée, on est facilement en échec scolaire. Des manques dans cette capacité à mettre en mots sa pensée peut également créer le sentiment d'être incompris (en particulier face à ceux qui maîtrisent mieux cette intelligence) et engendrer des réactions de violence.
      • l'intelligence musicale/rythmique
        C'est la capacité à être sensible aux structures rythmiques et musicales. Elle est bien entendu particulièrement développée chez les musiciens (compositeurs, exécutants, chefs d'orchestre), et chez tous les " techniciens du son " (ingénieur du son, fabricant d'instruments de musique, accordeurs). Elle se trouve aussi chez les poètes, et dans les cultures à forte tradition orale. On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui fredonne souvent, bat du pied, chante, se met à danser sur le moindre rythme ; chez ceux qui sont sensibles au pouvoir émotionnel de la musique, au son des voix et à leur rythme ; et ceux qui saisissent facilement les accents d'une langue étrangère. Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on perd une partie des richesses transmises par les sons, à travers les sons organisés comme dans la musique ou dans les infinies variations du langage.
      • l'intelligence interpersonnelle
        C'est la capacité à entrer en relation avec les autres. Elle est particulièrement développée chez les politiciens, les enseignants et les formateurs, les consultants et les conseillers, les vendeurs, les personnes chargées des relations publiques. On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui entre bien et facilement en relation, se mélange et s'acclimate facilement ; chez ceux qui aiment être avec d'autres et ont beaucoup d'amis, ceux qui aiment bien les activités de groupe ; chez ceux qui communiquent bien (et parfois manipulent), chez ceux qui aiment résoudre les conflits, jouer au médiateur. Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, il y a risque d'enfermement de la personnalité ; on se coupe du plaisir d'être avec d'autres, de travailler ensemble ; on perd des richesses issues du travail en coopération. On risque de devenir aigri, misanthrope, critique de l'humanité dans son ensemble.
      • l'intelligence corporelle / kinesthésique
        C'est la capacité à utiliser son corps d'une manière fine et élaborée, à s'exprimer à travers le mouvement, d'être habile avec les objets. Elle est particulièrement développée chez les danseurs, les acteurs, les athlètes, les mimes, les chirurgiens, les artisans, les mécaniciens. On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui contrôle bien les mouvements de son corps ; chez ceux qui aiment toucher, sont habiles en travaux manuels ; ceux qui aiment faire du sport, aiment jouer la comédie ; chez ceux qui apprennent mieux en bougeant, qui aiment faire des expériences ; l'enseignant la reconnaîtra dans l'élève qui se trémousse s'il n'y a pas suffisamment d'occasions de bouger, chez celui qui se lève en classe pour tailler un crayon ou mettre un papier à la poubelle. Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, l'enfant comme l'adulte risquent de ressentir leur corps comme une gêne dans de nombreuses circonstances de la vie courante.
      • l'intelligence visuelle / spatiale
        C'est la capacité à créer des images mentales, et à percevoir le monde visible avec précision dans ses trois dimensions. Elle est particulièrement développée chez les architectes, les paysagistes, les peintres, les sculpteurs, les naturalistes, ceux qui tentent d'expliquer l'univers, les stratèges de champ de bataille, les metteurs en scène, etc. On reconnaît particulièrement cette intelligence chez celui qui a un bon sens de l'orientation ; chez ceux qui créent facilement des images mentales ; ceux qui aiment l'art sous toutes ses formes ; ceux qui lisent facilement les cartes, les diagrammes, les graphiques ; ceux qui aiment les puzzles, ceux qui aiment arranger l'espace ; ceux qui se souviennent avec des images ; ceux qui ont un bon sens des couleurs ; ceux qui ont besoin d'un dessin pour comprendre ; etc. Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on peut avoir des difficultés dans les processus de mémorisation et de résolution de problèmes. Car les images produites dans le cerveau aident à la pensée et à la réflexion. Pour beaucoup de scientifiques célèbres, leurs découvertes les plus fondamentales sont venues de modèles spatiaux et non de raisonnements mathématiques.
      • l'intelligence mathématique / logique
        C'est la capacité à raisonner, à calculer, à tenir un raisonnement logique, à ordonner le monde, à compter. C'est l'intelligence qui a été décrite avec beaucoup de soin et de détails par Piaget en tant que " l'intelligence ". Elle est particulièrement développée chez les mathématiciens et les scientifiques, les ingénieurs, les enquêteurs, les juristes, etc. On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui aime résoudre des problèmes ; chez ceux qui veulent des raisons à tout, veulent des relations de cause à effet ; ceux qui aiment les structures logiques, et aiment expérimenter d'une manière logique ; chez ceux qui préfèrent la prise de notes linéaire ; etc. Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on a du mal à organiser des tâches complexes, à donner un ordre de priorité à une succession d'actes ; à comprendre le sens d'une démarche scientifique, à comprendre la signification d'un phénomène ; à démonter un appareil ou un processus pour en comprendre les parties ; à utiliser le raisonnement déductif ; à se servir d'appareils fonctionnant avec une grande logique (comme un ordinateur).
      • l'intelligence intrapersonnelle
        C'est la capacité à avoir une bonne connaissance de soi-même. Elle est particulièrement développée chez les écrivains, les " sages ", les philosophes, les mystiques. On reconnaît particulièrement cette intelligence chez quelqu'un qui a une bonne connaissance de ses forces et de ses faiblesses, de ses valeurs et de ses capacités ; chez ceux qui apprécient la solitude ; qui savent se motiver personnellement ; qui aiment lire, qui écrivent un journal intime ; qui ont une forte vie intérieure. Si cette capacité n'est pas suffisamment développée, on a du mal à tirer partie des expériences, à réfléchir sur ce qui a bien marché et comment améliorer ce qui a moins bien marché ; à prendre le contrôle de sa vie, de son apprentissage, à se donner des buts ; on est plus sensible à l'opinion de groupes ; on cherche (et on trouve) un responsable extérieur à ses échecs.
      • l'intelligence du naturaliste
        Elle a été rajoutée aux sept précédentes par Howard Gardner en 1996. C'est la capacité à reconnaître et à classer, à identifier des formes et des structures dans la nature, sous ses formes minérale, végétale ou animale. Elle est particulièrement développée chez le naturaliste, qui sait reconnaître et classifier les plantes et les animaux ; chez tous ceux qui s'intéressent au fonctionnement de la nature, du biologiste au psychologue, du sociologue à l'astronome. On la reconnaît chez ceux qui ceux qui savent organiser des données, sélectionner, regrouper, faire des listes ; chez ceux qui sont fascinés par les animaux et leurs comportements, qui sont sensibles à leur environnement naturel et aux plantes ; chez ceux qui cherchent à comprendre la nature et à en tirer parti (de l'élevage à la biologie) ; chez ceux qui se passionnent pour le fonctionnement du corps humain, qui ont une bonne conscience des facteurs sociaux, psychologiques et humains.

      • École, vers le déclin ? Entretiens avec de grands patrons
        Arnaud Brunet, Little big man, 2005, 206 pages

        mercredi 4 janvier 2006

        On a du mal à comprendre ce qui a poussé l’éditeur à donner un titre pareil à ce livre. Il n’y est nullement question de déclin de l’école dans les propos tenus par les grands patrons (Vincent Bolloré, Michel Bon, Michel Pébereau, etc.). Au contraire, malgré l’insistance de l’interviewer sur la « baisse de niveau » qu’ils auraient pu constater, ils sont loin de trouver que l’école forme mal leurs employés et de tenir un discours catastrophiste. Plusieurs ont l’honnêteté de dire qu’ils connaissent mal les questions scolaires et restent nuancés et modérés dans leurs avis. Au fond, on en reste à un point de vue basique, qui pourrait être tenu par bien d’autres « citoyens » ; on parle du goût de l’effort qu’il faut réhabiliter, de la motivation qu’il faut savoir donner, etc. On notera cependant la quasi unanimité à trouver les contenus scolaires trop académiques, à critiquer le culte du diplôme en France, on ne trouvera nullement d’enthousiasme naïf pour les nouvelles technologies dont ces chefs d’entreprise n’attendent pas des miracles si les utilisateurs ne sont pas d’abord compétents. On trouvera aussi, assez curieusement, un accord pour que des moyens conséquents soient donnés à l’école ; tous rejettent l’idée que le patronat diabolique voudrait des travailleurs peu formés et peu critiques, et insistent au contraire sur la nécessité d’une haute qualification. Les querelles entre pédagogues et républicains, évoquées de façon assez caricaturale par l’interviewer (un journaliste économique) sont mal connues de ces patrons, qui ont essentiellement un point de vue pragmatique. Les divergences apparaissent à propos de la discrimination positive, soutenue avec ardeur par Agnès Touraine, alors que d’autres, comme Marc Viennot, sont réservés. Le problème de l’enseignement supérieur est, lui aussi, évoqué bien sûr et il ressort fortement la revendication d’une plus grande autonomie des universités. C’est le niveau d’enseignement où les problèmes semblent, pour beaucoup, les plus aigus.
        Les questions sur les « exclus » du système sont intéressantes, car elles poussent davantage les patrons dans leurs retranchements. Pour beaucoup, l’exclusion, ce n’est pas le problème de l’entreprise (Vincent Bolloré le dit crûment).
        On est loin, avec ces entretiens, de la caricature qu’on aurait pu attendre : un discours d’idéologues favorables à la privatisation et à une école purement rentable, rejetant la culture. Cependant, on pourra trouver significative la remarque de George Plassat, souhaitant que l’université prépare plus à « travailler » qu’à « réfléchir », on constatera la récurrence des critiques du syndicalisme enseignant qui vont bien plus loin que le rejet légitime d’un certain corporatisme, et surtout un faible regard critique sur l’entreprise, dotée de toutes les vertus semble-t-il. Mais on a, sans langue de bois, des propos qui méritent d’être entendus. Le Crap-Cahiers pédagogiques a naguère invité pour un colloque le leader de l’Union des industries de la métallurgie, qui tenait des propos plus sévères sur l’école...
        Il faut saluer l’initiative prise par Arnaud Brunet et sa persévérance puisque apparemment, il n’a pas été si facile de réunir cette « brochette » de chefs d’entreprise (les responsables du Medef n’ont pas, eux, daigné répondre). En complément, l’auteur donne la parole à trois personnalités pour faire une « lecture » des propos patronaux. Gérard Aschieri, de la FSU, pointe avec pertinence les non-dits et les implicites, sans pour autant tirer à boulets rouges comme on aurait pu le craindre. Son intervention est autrement plus intéressante que celles de Denis Kambouchner (dont on pouvait attendre mieux) et surtout Philippe Reynaud qui partent de ce qui est dit dans le livre pour aller vers un discours de « restauration » favorable à l’orientation précoce et à un enseignement plus traditionnel . Il est dommage qu’il n’ait pas été donné l’occasion de proposer son point de vue à un des pédagogues engagés à qui Philippe Raynaud attribue une fascination pour l’idéologie libérale. Il serait temps, sur ce point, d’en finir avec les idées reçues et les caricatures...

        Jean-Michel Zakhartchouk


Liens utiles :



Dernière mise à jour : Hiver 2005
Vincent G. Chapin

Les informations contenues dans ces pages n'engage que leur auteur.